Site militaires du Mont Bataille

DEFENSES EXTERIEURES DE SAORGE 06540


Mise à jour mars 2017

Prospections Henri Guigues, Marcel Cordier, Raoul Barbès

          

Histoire militaire

L’histoire militaire du village et des péripéties annexes qui l’ont concerné, a été racontée dans de nombreux ouvrages, et notamment par Ernest Hildesheimer () page 61 et suivantes, Philippe Cachiardi de Montfleury () page 97 et suivantes, René Diana  (), page 81 et suivantes, sans oublier les saorgiens François Gaziello () et Joseph Cabagno. Un fils de ce vieux  pays, Charles Botton (),  relate entre autres,   l’évolution  de ces fortifications au cours des siècles.

 

 La prise de Saorge en 1794 a également fait l’objet d’un article de Michel Bourrier () dans la revue le Haut Pays 

Il apparaît que ce verrou dans la Roya constituait une très bonne défense du village contre des attaques venant de la vallée,  et aussi une assez bonne défense avancée du col de Tende. Cependant le débouché du col de Raus dans le vallon de Caïros permettait de remonter la vallée de la Roya en passant en amont du village.  Le bas de la vallée à Ambo, était néanmoins tenu sous le feu des canons du château Saint Georges et de ses annexes.

L’emplacement du col de Raus a été de tous temps hautement stratégique car il contrôlait le passage de la vallée de la Roya dans celle de la Vésubie. Cet emplacement était meilleur que celui un peu plus au sud de la Baisse de Saint Véran qu’il dominait. Des  fortifications sont visibles sur les cartes de Bourcet au milieu du XVIIIème siècle et des combats s’y sont déroulés pendant la guerre de la Révolution à partir de 1793.

Cependant, il est apparu très tôt que le village de Saorge était mal protégé contre des attaques venant de la montagne à partir notamment de la vallée de la Nervia et des cols situés à l’est du village, qui supposaient le passage par les territoires de la République de Gênes. C’est ainsi que le village a été pris par les Français en 1794. On peut noter que Pigna et Rochetta appartenaient à la maison de Savoie.

Voir aussi le dossier Internet: Saorge Masséna et Saint Amour dans le dossier Histoire

http://www.archeo-alpi-maritimi.com/Travaux_du_tunnel_de_Tende_1878.php

 

Description des ouvrages

 

1 - Défenses principales

 

Le château de Salles

 

Il a été aussi dénommé château des Salines (1794), Château de Salles (1890), Castel del  Sal.

Il se trouvait sur l’Iter publicum, le grand chemin public, avant la construction du Grand chemin ducal de Turin à Nice, qui a précédé la construction de la route Royale. (Voir Carte dans Histoire de Saorge et Fontan)

Ce château dominait le château Saint Georges qu’il a précédé sur la même arête à l’emplacement d’un collet donnant accès à la porte haute du village, et comporte une tour, peut être à gorge ouverte, contrôlant cette porte. On y voit encore les  murs des remparts, Des habitations à proximité ont peut être réutilisé  des matériaux provenant de ce château

 
Le château Saint Georges

 

C’est l’ouvrage principal situé sur une arête au nord du village. Il a été décrit dans divers ouvrages.

F. Gaziello () a repris des textes anciens. Il cite dans un article le texte en italien d’un témoin oculaire relatant les conditions de la reddition de la forteresse en 1794, le conseil de guerre qui a précédé l’abandon par le colonel Saint Amour, le procès et la condamnation de celui-ci à Turin. Cette question a été traitée également par Ch. Botton dans l’ouvrage cité.

Dans son livre, page 121, figure un plan dressé par l’ingénieur militaire Niquet en 1694, AHAT, et un plan d’ensemble des remparts levé par Lozières d’Astier page 123, AHAT

Un essai de reconstitution  a été effectué par Marcel Cordier () page 122.

L’accès aux ruines du  château est actuellement interdit et dangereux

Le château ne pouvait défendre que partiellement le bas du vallon de Cairos. Ch. Botton indique qu’il y avait cependant une ouverture pour une fenêtre de tir entre Saint Roch et le bois de Mairisetté

A Fontan, au 45 de la route nationale une plaque rappelle que la maison a été occupée par l’Etat Major austro-sarde, en 1793, quand il s’y est replié en abandonnant la Giandola.

 

2 – Les défenses extérieures

 

Une partie de ces défenses est notée sur un plan attaché à un article de R. Diana () page 80 et 81 et qui aurait été obtenu aux archives de la guerre par M. Gabagno.

Elles figurent aussi sur un plan du début du XVIII° obtenu par C. Botton auprès du service géographique de l’Armée Italienne.

Mais un plan très intéressant des Archives royales de Turin malheureusement non daté et non signé montre tout un ensemble de défenses extérieures qui ont été prospectées et annotées sur le plan avec des numéros de repérage.

Repère 1 - Forche d’Eza

Repère 2 – Secteur de la Madonne del Poggio

Repère 3 – mur le long du chemin

Repère 4  - Le Fortin

Repère 5 – Croupe de la chapelle Sainte Croix

Repère 6  - Plateau

Repère 7 – Ligne de crête de Peyramont Baisse de Cachin

Repère 8 – Château Saint Georges

Repère 9  - Château de Salles

Repère 10 – position supposées

 

 

Ce plan était il exécuté pour un projet de défenses ou correspondait-il à celles effectivement réalisées ?

 

La tour dite de l’Aigle

 

 

Elle se trouve au nord du village et selon Charles Botton () page 36 l’ancien chemin d’intérêt public « iter publicum » au sud du Brec di Roumei passait au pied de celle-ci.

La redoute de Saint Antonin.

 

Elle se trouvait au nord du château des Salines sur l’ancien  chemin du col de Tende qu’elle contrôlait sur une arête  en face du vallon de Cairos. Une prospection effectuée en septembre 2007 n’a permis de voir qu’une petite plateforme et un muret mais les rochers environnants étaient suffisants pour une défense naturelle de ce qui devait être surtout un point d’observation et de contrôle. Une question se pose sur ce nom de Saint Antonin.

Selon Charles Botton, il n’y avait pas de chapelle dans le premier cimetière, bâti sous la période française de 1794 à 1814. Une chapelle a été édifiée, vers 1934, quand la municipalité Claude Botton, a fait construire le nouveau cimetière.

Il est possible qu’une chapelle, pour faire ses dévotions avant d’entreprendre un voyage dangereux, ait été bâtie  dans ce quartier  où passait l’Iter publicum  avant d’entreprendre la descente pour atteindre la Tourette. Le village de Fontan n’existait pas, il n’a été bâti qu’après la construction du Grand chemin ducal.

 

Donc soit le plan du Ministère de la Guerre est inexact en ce qui concerne la dénomination de la redoute, soit son emplacement était à l’endroit du cimetière.

Un rapport de 1882 du colonel Wagner () page 15 signale « le long du mur du cimetière on voit encore les traces des embrasures d’une batterie de 4 pièces  et au dessus du mamelon il existe des vestiges de fortification. »

Dans le cimetière, côté Roya on peut voir contre le mur de clôture un petit local servant de dépôt qui pouvait avoir une destination d’observatoire mais d’époque peut être assez récente

 

La redoute de Saint Roch

 

Elle se trouvait en contrebas de la précédente sur le chemin descendant à Ambo face au vallon de Cairos, au droit d’un collet.

A cet endroit qui en 2007 servait d’atelier de menuiserie, on peut observer sur le côté droit de la chapelle Saint Roch des meurtrières. Les lieux auraient été remaniés sur les instructions de Vauban.

Sur l’entrée de la chapelle qui comporte un narthex on peut lire « Ste Rocche ora pro nobis »

Sur le rocher isolé qui domine la chapelle on peut observer un escalier en pierres assez large et au sommet du rocher un mur, mais l’endroit est inaccessible à cause de la présence de l’atelier.

 

Le promontoire entre Roya et Cairos

  Sur ce promontoire on remarque deux petits postes d’observation en fer à cheval en pierres sèches de 40 cm de haut environ dirigés vers l’amont de la Roya et des murs fortifiés le long du chemin en aval de la borne 427 où se trouve un casoun et des restanques correspondant à un petit terroir.

Cette position permettait un contrôle du confluent et pouvait communiquer facilement avec la chapelle Saint Roch

 

La redoute de Forche d’Eza

 

Elle se trouvait au Sud-Est  du village sur un promontoire dominant le confluent de la Roya et de la Bendola ; ce promontoire étant l’extrémité de l’arête où se trouve la Madone del Poggio.

Cette redoute avait disparu en grande partie de la mémoire collective mais elle a été retrouvée et décrite, avec plans et photos par J.M. Cordier et R. Barbès () et sur le site Internet : redoute forche eza saorge

Elle figure d’ailleurs sur le plan du ministère de la guerre à l’ouest de la Madone del Poggio.

 

Plateformes Est de Saorge

 

Elles dominent le village et ont été sommairement aménagées: voir plan ci-joint

 

Plateforme sur l’ancien chemin de Saorge

 

En descendant vers la route Nationale et la Bendola Inférieure près de la croix de Crafatinn au quartier anciennement dénommé « Forche d’Eza ». Une petite plateforme a été aménagée à cet endroit avec mur de soutènement sur deux côtés, dont on ne voit pas l’utilité autre  que militaire pour un canon par exemple.

 

Le fortin

Cette position domine le monastère sur un promontoire où se trouve une maison

(P) x= 1018.717, y=3200.419, z=579. Sa position offre de très belles vues sur la rive gauche du vallon de l’Oeunguiron et sur la croupe entre celui–ci et le vallon de la Coupéra.

A cet endroit pouvait être implantée de l’artillerie. De cet emplacement on domine le chemin fortifié décrit ci-dessous.

 
La fontaine

 

Une fontaine se trouve sur le chemin en aval du vallon de l’Oeunguiron sur le tracé d’un canal dont la prise d’eau se trouve dans le dit vallon un peu en amont d’un bassin. Un mur avec une porte limite une plateforme côté aval du chemin. Ce pourrait être un jardin privé, mais également une position militaire.

Ci-contre abreuvoir et prise d'eau

 
Le chemin fortifié de Pigna

Quand on emprunte le chemin qui à partir de la borne 161 se dirige vers le pont de Baoussoun on constate côté aval que sur quelques mètres ce chemin a l’aspect d’un chemin creux sans que ce soit justifié. On peut imaginer qu’à cet endroit maintenant envahi par la végétation le chemin servait de tranchée et de point d’observation sur la vallée.

Il est dominé et contrôlé par le fortin.

 

Note : Les jardins des notables étaient protégés par des murs d’enceinte afin d’éviter le maraudage des légumes

 

Le pont de Baoussoun

Bien qu’il ne constituat pas un point de défense, c’était un point de passage sur le chemin venant du Mont Jove utilisé d’ailleurs par les troupes révolutionnaires. Ce pont a été coupé à la Révolution et n’a été reconstruit qu’en 1833 comme indiqué sur la clé de voute côté aval.

Voir photos ci-contre

 

Le Casteou et la chapelle Sainte Anne

La  chapelle a été fortifiée mais les meurtrières ne se voient que de l'extérieur.

Les maisons du hameau proche ont aussi été fortifiées

Voir ci-desous le paragraphe : maisons fortifiées

Voir dossier Internet: chapelles rurales de saorge

 

La cote 725

 

Cet emplacement x= 1019.20 ; y=3201.025 ; z=725 est excellent comme point d’observation au moins. Il a de très bonnes vues sur la vallée notamment le secteur de la chapelle Sainte Croix. Sur place on ne voit pas de trace de fortifications mais une arête naturelle pouvait suffire pour se protéger.

 

La cote 545

 

X= 1019.040 ; y=3200.64 ; z=545

On voit des restes de maçonnerie en pierre sèche, mais qui ne sont pas significatifs. Le point avait de très bonnes vues à la fois  vers la croupe de la chapelle Sainte Croix et la Monastère

 

La croupe de la chapelle Sainte Croix.

 

On voit des murets sur l’arête en contrebas entre les points : x= 1019.454 ; y= 3200.737, z=681, et le point x=1019.415 ; y=3200.477 ; z=641

Les maisons fortifiées

 

On les rencontre sur la rive droite de la Bendola en allant vers Castou, notamment au lieudit Castou granges ruinées, borne 168 (x=1020 ; y= 3201 ; z=500) et au lieudit chapelle Sainte Anne (x=1020,3 ; y=3200.8 ; z=540).

Le colonel Wagner  a écrit une note sur les incitations du roi de Sardaigne à fortifier leurs maisons

Un peu en contrebas des granges ruinées citées ci-dessus, se trouve la « tour du Pailla », qui aurait pu faire partie des ouvrages de la Bendola

On peut voir aussi des meurtrières sur les deux maisons en ruine au bord du chemin de Saorge un peu avant d’arriver à la chapelle Sainte Croix, photos ci dessus

 

Peyremont

La redoute au nord-est de Saorge mentionnée par Durieu (voir plus haut) pourrait être au mont Peyremont. Cette enceinte peut-être celto-ligure a été remaniée au 18ème siècle : Voir Brétaudeau () page 526 et planche 473. C’est peut-être  de cette position que parle Wagner () en page 56, comme surveillant les chemins descendant de l’Anan

          

                            

Position de la baisse de Cachin

   Voir dossier Internet   cachin_peyremont_saorge

     (P) x= 1018.530, y=3201.407, z=921

Elle a été décrite par G. Brétaudeau (), page 526 sous le nom de « Enceinte nord de la cote 924 de Peyremont ou Peiremont » qu’il a qualifié : « d’enceinte agro pastorale ou pastorale, dont la partie supérieure a été remaniée au XVIIIème siècle ».

 

    En fait dans la partie supérieure on n’observe pas de gros blocs et les murs ont une épaisseur de 80 centimètres environ qui correspond à beaucoup de murs de défense militaires en pierre sèche du XVIIIème siècle. Par ailleurs la partie au nord ouest de la position a été laissée sans protection.

Ceci incite à penser que cette partie supérieure ne date peut-être que du XVIIIème siècle.

D’autre part on peut observer au sud est du site au-delà du fossé un mur grossièrement construit, non signalé précédemment, en angle, destiné à une protection avancée. 

(P) x=1018.570, y=3201.463, z=926

Cet ensemble constituant vraisemblablement un point de contrôle du passage constitué par la Baisse de Cachin avec une défense orientée vers le sud est c'est-à-dire du côté de la Bendola.

 

Autres positions

    

De part et d’autre du sommet de la cote 1049 au nord du col de Peyremont on peut observer deux positions individuelles ;

Celle située au nord, a une surface de 10m2 environ en pierres sèches de 80 centimètres de haut environ avec une meurtrière, l’ensemble pour une défense vers la Bendola. (P) x=1019.741, y=3201.924, z=1032

Celle située au sud du sommet est un peu plus grande. Elle est orientée pour une défense vers le nord et le nord est.

(P) x= 1019.751, y=3201.943, z=1041.

Tout cet ensemble a pu être réoccupé par les maquisards pendant la seconde guerre mondiale

  

Le château de Mallemort

 

Il se trouve sur la rive droite de la Roya et domine de très haut le village.  Il est devenu obsolète après la construction du Grand chemin ducal.

Il a fait l'objet de diverses publications, dans la revue "le Haut Pays" et un article de Georges Bretaudeau ()

 

Conclusion

 

Tout autour de Saorge on observe donc un certain nombre de positions militaires mais il n’a pas été remarqué de fortifications lourdes dans la vallée de la Bendola qui était pourtant le point faible de la défense. Certaines de ces fortifications ont pu être réalisées ou réutilisées par les maquisards pendant la seconde guerre mondiale.

En 1794 les positions de Saorge ont été debordées par les crêtes à l'est, et les troupes françaises se dirigeant vers la Brigue menaçaient Saorge d'encerclement

 

Bibliographie

 

Botton Charles – Histoire de Saorge et de Fontan – éditions du Cabri 2009

 

Bourrier Michel, La prise de Saorge, le Haut pays N° 28, 1994

Brétaudeau Georges- les enceintes des Alpes Maritimes éditoins IPAAM 1996

 

Cachiardi de Montfleury Philippe – Bonaparte à Breil et la prise de Saorge – Nice Historique 1969

 

Compan André, Nice Matin du 22 juillet 2007

 

Cordier Jean Marcel et Barbès Raoul – Le Haut Pays N°

 

Cordier Jean Marcel et Barbès Raoul – Le Haut Pays N°

 

Diana Robert – le Chevalier de Saint Amour – Nice Historique 1976

 

Gaziello François. Histoire de Saorge. Imprimerie Peirotti. 1977.

 

Gaziello  François -  divers articles parus dans Nice Historique

 

Hildesheimer Ernest - Le passé militaire de Saorge - Nice Historique  N° 150, 1959

 

Noaro Pietro Institut International d’Etudes Ligures – Relazione sulle fortificazione di Dolceacqua

 

Wagner E. (Capitaine) – Mémoire sur la reconnaissance des hauteurs entre la Vésubie et la Roya occupées par les armées française et austro-sarde en 1792, 1793 et 1794, documents du SHAT Paris