Point du Ramingao à Roquebrune Cap-Martin

FRANCHISSEMENT DU VAR

Le franchissement du Var dans les anciennes limites du Comté de Nice

Première partie


Mise à jour 25 03 2024

Etude Jacky Sarale

Ci dessous de gauche à droite

titre des photos

Titre de dédicace à Marie Jeanne Baptiste et Victor Amédée II pour le pont en construction sur le Var à Bonson1680 in Fiume Varo mazzo 1 N°28

Plan du fleuve Var de l’ancien pont de Bonson à la Roquette 1845

Carte du Pont de Bonson

 

Ce fleuve de 110 km de long prend sa source au pied du col de la Cayolle sur la commune d'Entraunes et se jette dans la Méditerranée à Nice

Il coule presque entièrement dans le département des Alpes-Maritimes avec une toute petite partie dans celui des Alpes de Haute Provence mais aucunement dans le département qui porte son nom aujourd'hui

A l'origine de la création des départements sous la Révolution ce fleuve était presque entièrement à l'intérieur de ce département du Var avec sa partie aval limitrophe avec le Comté ; mais après l'annexion du comté de Nice à la France un nouveau département des Alpes Maritimes fut créé englobant une partie de l'ancien territoire annexé complété de la partie orientale du précédent qui comprenait ce fleuve. La raison invoquée étant que la superficie de ce nouveau territoire n'était pas suffisamment conséquente.

Ainsi le département du Var est le seul en France portant le nom d’un cours d’eau situé hors de ses limites territoriales.

Si ce fleuve était bien frontière entre la France et les Etats de Piémont Sardaigne lors de l'annexion, il n’en n'a pas toujours été ainsi.

Avant les rectifications de frontières de 1760 entre le Royaume de France et celui de Piémont Sardaigne certains villages en rive droite du Var faisaient partie des États de Savoie comme Gattières, Bouyon, Dosfraires et Fougassières. Les territoires de ces deux derniers villages aujourd'hui disparus ont été rattachés au Broc

Ainsi ce fleuve n'était frontière que dans sa partie la plus méridionale, de son embouchure à Gattières.

 

Au niveau de Gattières

 

L’absence de facilité de franchissement dans cette partie était un atout non négligeable pour l’intégrité des Etats de Savoie souvent menacée par leur puissant voisin et de ce fait un peu négligée par le Pouvoir.

Sur cette partie son cours était très étendu et pouvait atteindre 900 m entre les pieds des collines qui le bordent, avec des eaux empruntant de nombreuses méandres et fluctuant en fonction du débit et des saisons.

L’endiguement ne débutera qu’à la fin de la période Sarde pour la rive gauche et sera continuée sous Napoléon III, elle interviendra plus tard pour la rive droite française.

Il était inenvisageable avec les moyens de l’époque de construire un ouvrage de franchissement aussi important.

C’était donc un gué qui permettait le passage et qui existait déjà sous la période romaine, permettant à un tronçon secondaire de la voie Julia venant de Nice-Cimiez par Gairaut et St Roman de Bellet de continuer sur Gattières et Vence.

Ce gué sera utilisé jusqu’au XIXème siècle et donnera lieu pour s’assurer une bonne traversée à l’implantation d’une chapelle sur chaque rive du fleuve pour demander aux puissances divines d’assurer une bonne traversée et les remercier de leurs protections. (Dédiées à St Sauveur et ND du Var) : voir article sur le site internet

 

 http://www.archeo-alpi-maritimi.com/chapellesaintsauveurnice.php

 

Bonson et La Roquette St Martin-Gilette

 

Pont de Bonson

 

En amont de l’embouchure de l’Estéron la largeur du Var diminue considérablement dès le territoire de Gilette et présente un goulot d’étranglement au lieu-dit le Gabre sur la commune de Bonson et face au quartier de Plan du Var de Levens 500 m environ en aval du confluent avec la Vésubie.

Ce changement de topographie permettait l’implantation d’un ouvrage permanent

et cette situation favorable était confortée par le débouché à ce niveau du chemin muletier qui de Nice par l’Abadie Tourrette-Levens, Levens permettait en traversant le Var de rejoindre Bonson, Gilette la vallée de l’Estéron ou par Ascros, Malaussene ainsi que Puget -Théniers rejoindre le nord du Comté, et en poursuivant par le col des Champs accéder également à Barcelonnette qui fit partie pendant longtemps du Comté.

Il faut rappeler qu’à ces époques les chemins évitaient le fond des vallées pour des raisons de sécurité et également de difficultés de réalisation dans des gorges étroites à la merci de crues soudaines et violentes ; pour la route du Var on ne viendra à bout du défilé du Chaudan que vers la fin de la période Sarde (Mai 1860).

 

La nécessité de la construction d’un pont en ce lieu propice est très ancienne.

Dès le XVème siècle dans un acte du Roi René de Provence daté du 17 novembre 1442 il est fait mention d'un projet de construction mais il n’est pas prouvé que ce projet se soit réalisé.

En revanche sous la régence de Marie Jeanne Baptiste mère de Victor Amédée II de Savoie un pont fut construit en 1677 ; il servira jusqu’en 1730 année qui vit sa destruction complète par une crue du fleuve

Il faudra attendre presque un siècle pour qu’un nouveau pont soit reconstruit en 1827. Il s’agira alors d’un pont muletier suspendu avec un tablier en bois « qui permettra le passage des charrettes » comme le précise l’Intendant général Crotti.

Ce pont subira de nombreux dommages et sera définitivement détruit en 1843. Son remplacement par le pont Charles Albert situé plus en aval face à Gilette et La Roquette St Martin n’interviendra qu’en 1852.

Note.

De nos jours un pont métallique sur ce lieu permet le passage des véhicules sur une seule voie.

Ce pont privé construit en 1904 pour la Centrale électrique de la Société des Forces Motrices des Alpes Maritimes absorbée en 1905 par l’Énergie électrique du littoral méditerranéen appartenait à l’EDF qui le cédera à la Métropole Nice Cote d’Azur en 2022.

Long de de 146 m il repose sur 2 piles maçonnées dans le lit du fleuve et supporte une voie ferrée s’embranchant sur la ligne de chemin de fer à voie métrique Nice-Digne

Les gués et bacs

Ce pont à facilité les échanges entre les différentes communautés du comté tout le temps où il était en service soit environ 69 ans.

Mais naturellement en l’absence de pont la traversée du fleuve était nécessaire et pour cela il fallait le passer à gué avec tous les risques inhérents à ce moyen de franchissement, perte de marchandises, de matériel, de bêtes et également pertes humaines.

De nombreux passages existaient ; outre celui de Gantières on en trouvait face au Broc à Gilette et Bonson.

Pour limiter les risques on pouvait faire appel à des « guéyeurs » qui par leur connaissance du fleuve permettaient un franchissement sans risque à un tarif plus ou moins réglementaire.

Ce service rémunéré était assuré par des habitants des villages concernés.

Un autre moyen était le bac ; le privilège d’établir ce service incombait au seigneur du lieu qui percevait un droit de passage. Un tel moyen fut mis en place comprenant ’une barque amarrée à un câble (corde) reliant les 2 rives.

Le plus connu est celui face à Gilette et La Roquette St Martin mais un autre a également fonctionné à Bonson.

Tout cela prendra fin en 1852 par la mise en service du pont Charles Albert

Le pont Charles Albert

 

L'écroulement du pont de Bonson conforta la nécessité de son remplacement réclamé par les communautés de la rive droite du fleuve et l'emplacement retenu se situait face à la Roquette Saint-Martin et à Gilette quartier de la Madeleine

En ce lieu la largeur du fleuve atteignait, plus de 200 m et l’endiguement du côté rive gauche était terminé.

La construction d'un pont nécessitait donc plusieurs travées s'appuyant sur de nombreuses culées dont les fondations devaient être établies à grande profondeur.

Ces difficultés firent préférer la technique du pont suspendu qui en ce début du 19e siècle en était encore à ses débuts ; elle permettait de réduire le nombre de culées.

Le projet définitif fit l'objet d'une convention du 28 juin 1849 et le nom de Charles Albert qui venait d'abdiquer lui fut donné.

La chaussée faisait 5 m 40 de large établie sur trois travées, celle du centre de 98 m 50 de portée était la plus longue les deux autres, latérales, mesuraient 67 m, la longueur totale atteignait 231 m entre les deux rives.

Le financement serait assuré par les communautés de l'arrière-pays ainsi que par le pouvoir royal et la province.

Il serait à péage pour couvrir les dépenses engagées.

Cependant de nombreuses difficultés financières apparurent, les communautés n'ayant pas toujours les revenus pour financer un tel projet et contestant la répartition entre les différents villages, la province et le gouvernement royal.

Néanmoins en novembre 1852 le pont était achevé.

Le péage sera supprimé après le rattachement du Comté de Nice à la France par arrêté préfectoral du 25 juillet 1861 et l'entretien sera dès lors assuré par le département

Cette belle réalisation technique avait cependant des défauts en particulier l'absence de trappes de visite pour vérifier la fixation des câbles ainsi que leur usure.

Des 1888 des problèmes surgirent sur les câbles et de 1898 à 1901 on procédera à la reprise des ancrages.

 

Note

Il sera remplacé en 1913 par un pont en béton, emporté par une crue du Var en 1961 et remplacé par l’ouvrage actuel en béton précontraint

 http://www.archeo-alpi-maritimi.com/ancienpontcharlesalbert.php

Ces ouvrages rendaient le franchissement du Var plus aisé en permettant aux chemins dits muletiers (mais qui souvent se réduisaient à des sentiers étroits ne permettant pas le croisement) de rejoindre le haut pays en passant par les hauteurs de l’Estéron.

Il fallait donc à nouveau traverser le Var pour accéder aux villages de Villars, Touet, Puget-Théniers et par Massoins la Tinée.

D’autres ponts ont été construits à diverses époques et de divers types face aux villages précités.

 

Le pont de Massoins-Malaussène

 

A suivre