De 1700 à 1713 suivant le dictionnaire de G Casalis

Guerre de succession d’Espagne

 


Mise à jour mai 2016

 

Photo d’un ex-voto de la Maison du Patrimoine de Roquebrune sur Argens 83520

 Le texte en bas du tableau indique :

 

DEIPARAE VIRGINI VOVIT SE LOCUS CUIUS PRAESIDIO INCENDIUM NON EST DUM VENIT VICTOR ET REDIT VICTUS SABAUDIAE DUX XXV AUGUSTI 1707

 

Ce lieu se voue à la Vierge mère de Dieu dont la Place n’est pas incendiée, pendant qu’arrive vainqueur et repart vaincu le Duc de Savoie XXV aout 1707

 

 

Traduction du texte de Casalis, pages 937 à 942

 

 

« Le 10 novembre 1700 Charles II meurt dans la fleur de l’âge.

Quelques jours avant sa mort les intrigues de la Cour de France soutenues par le Cardinal Archevêque de Tolède lui arrachèrent un testament par lequel il instituait comme héritier universel Philippe  duc d’Anjou, petit fils de Louis XIV, lui substituant en cas de décès sans succession son frère le duc de Berri, l’archiduc Charles en troisième lieu et finalement le duc de Savoie. Il déclara en même temps qu’en aucun cas le Couronne d’Espagne ne pourrait être réunie à celle de France ou à celle de l’Empereur.

Ce testament irrita le Cabinet autrichien et l’Empereur emplit l’Europe de ses lamentations et protestations ; mais Philippe d’Anjou soutenu par le France et un accord favorable de Madrid fit reconnaître son autorité non seulement en Espagne mais également par les Royaumes de Naples et  de Sicile, dans les Flandres et le Milanais.

Pour mieux s’assurer l’assistance du duc de Savoie, Philippe, avec l’assentiment du Roi de France demanda en mariage la Princesse Marie Louise Gabrielle fille de ce Duc, et ce mariage consolida  le droit éventuel que Victor Amédée avait acquis en vertu du testament de Charles II.

La jeune épouse partit de Turin  au début de septembre avec un brillant cortège. Elle arriva à Nice le soir du 28 du même mois ; elle y reçut un accueil des plus splendides et le 30 elle s’embarqua dans le port de Villefranche sur les flottes espagnole, napolitaine et française, qui y étaient arrivées depuis peu pour la transporter à Barcelone. A l’allégresse qui avait inspiré ici le séjour de la Reine d’Espagne devaient succéder bientôt de très graves désastres. L’Angleterre, la Hollande et l’Autriche s’armèrent contre Philippe d’Anjou et contre la France. Le célèbre Catinat à la tête de  cinquante mille hommes parut en Piémont au Printemps 1701 et ne laissa pas au duc  de Savoie la liberté de choix. Pour prix de sa collaboration qui devenait importante, il lui donna le titre de généralissime des armées françaises, mais dans le cours de cette guerre pendant laquelle les troupes françaises, par la faute du Maréchal de Valleroi, furent plusieurs fois battues, le Duc de Savoie avait de très graves motifs de s’indigner de la façon qu’avait Louis XIV de se conduire avec lui et n’hésita plus  sur le parti qu’il lui restait à prendre. Subitement il augmenta la garnison de la citadelle de Turin, et le 3 décembre il publia un manifeste où il proclamait son alliance avec l’Autriche ; il appela aux armes tous ses fidèles sujets. L’Europe applaudit à l’énergique résolution  d’un Prince outragé ; les populations se levèrent en masse et répondirent avec enthousiasme à l’invitation faite à leur courage.

Le Marquis de Caraglio, gouverneur de Nice, prit alors toutes les précautions possibles pour mettre la ville et le château en état de défense. Puis, en peu de temps le duc de la Feuillade  s’avança dans le Comté de Nice avec huit mille fantassins et deux mille deux cents cavaliers.

Dans la matinée du 3 mars 1705 il passa le Var. Une flotte sortie du port de Toulon, forte de huit vaisseaux  et six frégates, sans compter des bâtiments légers, apparut en même temps devant Nice sous les ordres du Maréchal de Roja. A peine le Duc de la Feuillade sut que les divers lieux fortifiés du Comté  étaient occupés par les troupes qu’il avait chargées de s’en emparer, il fit investir de tous côtés la ville de Nice. Le matin du 16 mars 1705 ses batteries commencèrent à bombarder la ville. Une bombe tombée sur l’église S.Reparate, au moment où on y célébrait une messe solennelle, tua beaucoup de fidèles qui y étaient rassemblés. Ce funeste évènement apporta la terreur  parmi les citadins. Le bombardement continua les jours suivants sans interruption, tellement que l’inflexible Marquis de Caraglio dut finalement laisser la liberté aux Consuls de traiter  une  capitulation avec le général français, après laquelle le Marquis d’Ussone, au service de la France, prit possession de la ville avec quatre mille fantassins  sans qu’il ne se produise aucun désordre.

Le Duc de la Feuillade, pendant qu’il s’occupait à disposer ses batteries pour commencer l’assaut du château dont il prévoyait une résistance  très obstinée, reçut l’ordre de se rendre immédiatement en Piémont  avec une partie de l’armée pour s’opposer à la marche des Impériaux commandés par le Prince Eugène de Savoie. Il prit donc le chemin du col de Tende, ne laissant devant le château de Nice qu’un corps d’observation sous les ordres du lieutenant général Marquis d’Ussone. On convint alors d’une suspension d’armes dans tout le Comté de Nice qui devait durer jusqu’à fin novembre de la même année.

Une telle convention fit naître un espoir de paix, mais après la bataille de Cassano où les Impériaux avaient le dessous, une nouvelle armée sous les ordres du maréchal de Berwick passa le Var le 30 octobre  et allant s’unir au Corps d’observation  se retrancha  au Mont Alban. Berwick alla camper sur la colline de Cimiez et fit placer ses batteries d’assaut sur les hauteurs de S.Charles dans le quartier de l’Empeyrat du Mont Gros et au Mont Alban.

Le Seigneur de Saure, Intendant général de l’artillerie, y amena un parc de soixante canons de gros calibre et seize mortiers. Le feu des batteries recommença le 8 décembre et continua tout le mois de part et d’autre.

Le premier janvier, une colonne  de grenadiers dirigée par Berwick assaillit l’ouvrage à corne qui couvrait le front de la Place du côté du Paillon et s’en empara. De là quelques canons tournés contre le bastion supérieur ouvrirent trois larges brèches que les assiégés essayèrent en vain de réparer.

Deux jours après les régiments de Cambresis et d’Irlande montèrent à l’assaut avec une merveilleuse résolution ; les grenadiers parvinrent jusqu’en haut des fortifications mais le Comte de Castellar et le Chevalier Tonduti à la tête des régiments de Chablais  et de Nice, se précipitèrent sur les ennemis et les repoussèrent vigoureusement ; malgré cela le Duc de Berwick  ordonna le lendemain un assaut général ; la garnison était affaiblie et découragée ; la Place était en piteux état et d’autre part après  la catastrophe de 1691 le donjon n’offrait plus  aucun moyen de défense. Dans ces conditions misérables, le Marquis de Caraglio réunit un Conseil de guerre qui décida d’accepter une capitulation honorable, laquelle fut signée le 4 janvier 1706. Berwick suivant l’ordre reçu de Louis XIV fit ensuite démolir toutes les fortifications de ce château et se rendit à Paris pour recevoir le bâton de Maréchal de France, laissant le commandement de l’armée au Marquis d’Ussone.

Déjà la plus grande partie des troupes avaient pris leurs quartiers en Provence par manque de vivres ; les campagnes de Nice n’offraient plus aucun moyen de subsistance ; les habitants en proie à une terrible disette souffraient de toutes les privations qui sont les conséquences  d’un tel fléau ; les souffrances de la faim produisirent une cruelle épidémie ; la mortalité devint extrême aux mois de juin et juillet 1706 ; les hôpitaux, les couvents, les maisons des particuliers, et aussi les rues et les places publiques étaient encombrées de morts et de mourants.

Au milieu de cette désolation générale  l’évêque de Nice, Henri Provana, donna des preuves lumineuses d’une charité vraiment apostolique envers les malheureux niçois. Sa mort provoqua un deuil douloureux dans la population  dont il était depuis longtemps le Pasteur et le père. Entre temps le Haut Comté de Nice  fut entièrement conquis par une forte colonne de  troupes françaises sous les ordres du Brigadier Général Comte de Grimaldi pendant qu’une autre colonne commandée par le Maréchal de Camp Marquis Devins, occupait militairement la vallée d’Oneille. Ceci étant, néanmoins Philippe V et Louis XIV se trouvèrent abandonnés par la chance. Le Piémont devint la tombe de leurs armées et la mémorable bataille de Turin gagnée par le Prince Eugène et par le Duc de Savoie le 7 septembre 1706, abaissa leur orgueil et changea complètement l’aspect des choses. Les Français complètement battus perdirent en un seul jour les fruits de deux années de victoires. Les défaites successives qu’ils subirent en Piémont et en Lombardie couronnèrent bientôt le triomphe des alliés. Louis alors offrit la paix et du fait que les propositions qu’il fit furent rejetées, le 8 mars de l’année suivante fut signée une convention par laquelle les troupes françaises évacueraient entièrement l’Italie et se retireraient au-delà des Alpes.

Durant l’hiver et le Printemps 1707, se firent de grands préparatifs de guerre. Victor Amédée insista pour que l’armée pénètre au cœur de la France par le Dauphiné, mais l’Angleterre proposa et obtint qu’on entreprit l’invasion de la Provence parce qu’elle visait  de s’emparer de Toulon et de ruiner l’Etablissement maritime qui excitait sa jalousie. Ce n’est pas le lieu de décrire les détails de cette expédition qui réussit dans un premier temps de façon très heureuse, mais qui eut une fin malheureuse. Les alliés après avoir consommé inutilement énormément de poudre et de projectiles, durent en lever le siège et reprendre la route du Comté de Nice.

La retraite commença le 22 aout ; les Impériaux évacuèrent la Provence plus rapidement qu’ils ne l’avaient envahie. Le désordre et la confusion entrèrent dans les troupes alliées poursuivis par les français et repassèrent le Var le 7 septembre après avoir perdu plus de dix mille hommes et presque toute l’artillerie de campagne.

Le Marquis de Mont Georges commandant l’avant-garde française s’approcha bientôt avec dix bataillons et  mille deux cents chevaux détachés de l’armée du Maréchal de Tessé. Les Consuls de la ville de Nice allèrent en hâte à leur rencontre et les conjurèrent d’épargner les habitants mails ils furent forcés de payer sous vingt-quatre heures une contribution de cent mille francs.

Très rapidement les français occupèrent entièrement le Comté de Nice.

Dans la nuit du 13 février 1709 un gel extraordinaire fit périr dans la région de Nice tous les arbres fruitiers et aussi les arbres qui résistent au froid dans les régions du nord ; par ce fléau se manifesta bientôt, le manque d’aliments les plus indispensables à la vie. Beaucoup de personnes moururent de faim et sans la générosité d’un vertueux ennemi, Nice aurait été entièrement dépeuplée. Le Marquis de Mont Georges fit venir  une grande quantité de céréales des ports du Languedoc ; il voulut que durant tout l’hiver on distribue aux habitants de la ville du pain autant qu’aux soldats de la garnison.

La campagne de 1710 s’ouvrit sous des auspices plus favorables, mais les derniers résultats n’en furent pas plus heureux. Il est vrai par ailleurs que Louis XIV à qui la fortune ne souriait pas en Flandres et sur les rives du Rhin, prêta finalement l’oreille à des propositions de paix. Les puissances belligérantes envoyèrent leurs plénipotentiaires au congrès d’Utrecht, et c’est là que le Comte Maffei chargé de défendre les intérêts  de la Maison de Savoie put obtenir pour son Seigneur Duc un accroissement de gloire et de puissance ».

 

Bibliographie

 

Dizionario geografico storico statistico commerciale compilato per cura del Professore e Dottore di Belle Lettere

Gioffredo Casalis Cavaliere dell’ordine de SS Maurizio e Lazzaro

Opera molto utile agli impiegati nei pubblici e private uffizi a tutte le persone applicate al foro alla milizia al commercio e singolarmente agli amatori delle cose patrie

Bibliothèque municipale de Nice

Tome XI B 8143 – date 1843