Mise à jour novembre 2018
Prospection
L’état des lieux en rive droite n’a pu être fait à cause de la végétation
Photo de gauche : plaque à la mémoire de Charles Albert, lors de son passage à Laghet, près du porche du monastère à droite après la défaite de Novare Photo de droite: le pont modenre |
Historique
Jean Bernard Lacroix () page 244 et suivantes, a écrit un article sur les ponts des Alpes Maritimes dont celui de la Roquette sur Var.
Ce premier pont a été édifié dans les années 1850 un peu en amont de l’embouchure de l’Estéron. On le connaît sous le nom de pont Charles Albert, souverain du Royaume de Piémont Sardaigne qui a quitté le pouvoir en 1851 après le désastre de Novare.
Ce pont était commencé dès 1837, pour être achevé en 1852.
A l’origine c’était un pont suspendu. Depuis il a été remplacé par un pont plus moderne.
Curieusement ce type de pont était parfois dénommé « pont en fil de fer »
En 1826, Seguin Ainé () avait remis un rapport à l’Académie des Sciences sur ce type de pont, consultable sur Internet
Son édification a été très laborieuse pour des raisons techniques et financières.
Avant 1760 la frontière du Comté de Nice avec la France était compliquée de part et d’autre de l’Estéron.
Par le Traité de Turin de 1760 elle a été rectifiée et la frontière a été établie le long de l’Estéron
Il y avait sur la rive droite de l’Estéron près de l’embouchure un petit fort dénommé redoute de la Pinatelle, qui a dû notamment servir à contrôler les trafics dans ce secteur où il y avait des gués auparavant.
Les ruines de ce fort relativement bien conservées sont encore visibles
Voir dossier Internet
En 1795 deux officiers français ont décrit le trajet entre le col de la Cayolle et Nice.
Certains tronçons de ce chemin existent encore. Il aboutissait au Var un peu en aval du futur pont de la Roquette mais la partie basse entre Gilette et la rivière est en mauvais état
Extraits du Journal l’Avenir de Nice
Mardi 4 décembre 1850
On nous rapporte que les travaux du pont en fil de fer de Saint Martin du Var viennent d’être suspendus vu le manque de fonds de la part du consortium qui se trouve en arrière d‘une centaine de mille francs envers l’entrepreneur. Cependant le comité représentant l’association des Communes a cru devoir se charger lui-même des travaux aux frais et dépens de l’entreprise. Malheureusement on nous assure qu’au lieu de l’achèvement des travaux si vivement souhaité un procès va s‘engager sur cette affaire.
Jeudi 27 mars 1851
Projet d’emprunt pour l’achèvement du pont suspendu à Saint Martin du Var
Il vient de paraitre un mémoire du Comité d’Association des Communes de l’Estéron et du Var relativement à la situation financière de l’entreprise du pont et à un projet d’emprunt pour l’achèvement de ces travaux.
L’historique du pont de Saint Martin du Var offre tant de péripéties et un si grand nombre ed fautes que nos concitoyens ne les liront pas sans intérêt.
Le projet primitif conçu par Mr l’Ingénieur Dogliotti et approuvé par le Congrès permanent du Génie à Turin ne s’élevait d’abord qu’à 200.207 Fr. Cependant en 1837 peu de temps après le commencement des travaux, on reconnut que la roche de la culée rive droite composée de masses fragmentaires amoncelées n’était point asse solide, et l’on dut creuser les fondations à une plus grande profondeur.
Cette première augmentation de dépenses s’est élevée à 48.765 Fr
En même temps il fut aussi reconnu que la longueur du tablier du pont qui n’était évaluée sur le projet qu’à 212 mètres devait être portée à 231.50 mètres. Par suite de cet excédent de 19.50 mètres sur la longueur du pont, l’entrepreneur suspendit les travaux et fit actionner le Comité d’Association des Communes pour résilier le contrat et demander une indemnité.
Cette seconde augmentation pour la longueur du pont s’élève à 50.678 Fr.
Sur ces entrefaites, Mr l’Ingénieur Vanni fut chargé de modifier le projet Dogliotti. Son devis y compris les travaux existants qu’il fallait utiliser s’élevait d’abord à 217.145 Fr. Ce nouveau projet fut approuvé par le Congrès permanent du Génie.
Le procès fut alors suspendu entre le Comité d’Association des Communes et l’entrepreneur, et les travaux du pont furent alors repris.
Mais on s’aperçut bientôt de plusieurs omissions graves qui avaient été faites dans le nouveau projet et de la nécessité de consolider certaines parties du pont, de sorte que l’ensemble des travaux d’art devaient s’élever à 309.639 Fr. En effet, en y ajoutant 24.434 Fr de frais de direction, qui avaient été oubliés dans le projet il en résultait une somme totale de 334.103 Fr.6Fr. L‘augmentation définitive sur le premier projet s’élevait à 133.895 Fr.
Les sommes dépensées jusqu’à ce jour, y compris les versements de l’exercice 1851 montent à 189.957Fr.
Il reste donc à subvenir à une dépense de 144.146 Fr pour l’achèvement des travaux. Mais attendu la retenue du dixième qui ne sera restituée à l’entrepreneur qu’après la réception des travaux, cette dernière somme peut sans inconvénient se réduire à 123.000 fr que le Comité se propose d’emprunter à la Caisse Nationale des Anticipations et Dépôts.
En résumé, malgré les fautes administratives qui ont été commises au préjudice de la Province de Nice, et puisque les travaux du pont se trouvent aux deux tiers de leur exécution, il est dans l’intérêt des Communes associées de s’imposer encore un dernier sacrifice pour achever une entreprise aussi importante et si longtemps désirée. Nous souhaitons vivement que cet emprunt se réalise au plus tôt.
Cependant comme la Caisse Nationale des Anticipations et Dépôts a été épuisée en 1848 et ne s’est plus relevée depuis cette époque, il serait facile d’établir entre les Communes un système d’emprunt mutuel au moyen duquel les Communes qui ont besoin de fonds pourraient les emprunter aux Communes riches en forêts qui retirent souvent des capitaux très considérables de leurs coupes de bois. Quoi qu’il en soit le pont de Saint Martin devrait être achevé à tout prix pour l’intérêt et l’honneur du pays.
Jeudi 18 novembre 1852
N°492 A partir d’aujourd’hui 18 novembre le nouveau pont sur le Var est livré à la circulation
Lundi 22 novembre 1852
Nous recevons de Monsieur Charles Castagnone, entrepreneur du pont suspendu de la Madeleine les renseignements suivants relatifs à l’ouverture de cette nouvelle voie de circulation dans notre province qui en a tant besoin
« Dans le numéro 492 de l’Avenir de Nice vous avez annoncé au public que le pont suspendu sur le Var, près de Saint Martin, vient d’être ouvert à la circulation.
Comme complément de cette nouvelle, je vous prie de bien vouloir prévenir le public que si j’ai consenti à permettre momentanément le passage, ce n’a été que pour condescendre à la demande de Monsieur l’Intendant Général et eu égard au danger que présente dans cette circonstance le passage du Var à gué.
Cependant il a été convenu que l’on paierait dès à présent le droit de péage et que je serai libre de fermer nouvellement le pont, si toutefois le Consortium es Communes ne se mettait pas en mesure de remplir de son côté ses obligations »
En ouvrant nos colonnes à la rectification ci-dessus, nous sommes heureux de pouvoir constater, comme une garantie pour l’avenir, que ce pont suspendu a été soumis de la part de Monsieur l’ingénieur en chef de la Province aux épreuves aux épreuves les plus complètes et que le résultat a été aussi satisfaisant qu’on pouvait le souhaiter, comme il en résulte du rapport qu’en a fait l’ingénieur et dont la conclusion se résume en ces termes :
« Après les épreuves subies avec le meilleur succès, épreuves supérieures sans doute à toute charge que puisse jamais supporter le pont sous le plus fréquent passage, je n’hésite point à le déclarer digne de la plus grande réception ; ainsi que méritent d’être définitivement acceptés tous les ouvrages qui composent cet édifice, après les avoir reconnus dans toute leurs parties, exécutés avec de bons matériaux, avec habileté et avec un soin peu ordinaires. A ce sujet on doit accorder des éloges distingués à Monsieur Vanneri auteur du projet, qui a eu la direction et à l’entrepreneur Monsieur Charles Castagnone qui n’a rien épargné pour donner à cet ouvrage d’art toutes les conditions de solidité et de régularité que l’on pouvait désirer »
Nous croyons nous rendre les interprètes de l’opinion publique en témoignant nos plus vifs sentiments de satisfaction pour l‘achèvement et la bonne réussite d’une œuvre qui avait été si mal commencée par d’autres et d’autant plus qu’on a lui su (sic) donner le caractère d’un véritable monument. Nous nous réservons de publier de plus amples détails sur cette construction remarquable ; nous ajouterons cependant que le Var par la crue extraordinaire de ces jours derniers, a voulu lui aussi procéder à la réception des travaux et que le pont étant resté inébranlable, le seul regret qu’on puisse exprimer, c’est de ne pas voir à quelques kilomètres plus bas le misérable et dangereux pont en bois de St Laurent remplacé par un pont solide et durable.
Dimanche 9 octobre 1853
Un membre de la commission administrative du pont suspendu de Sai t Martin du Var nous communique la cote suivante :
Le mouvement et les recettes du dernier trimestre, juillet, aout et septembre ont été les suivantes :
Voyageurs 9291 à 05 centimes 464.51
Chevaux et mulets 3488 à 10 centimes 348.88
Veaux et porcs 14 à 05 centimes 70.00
Moutons et chèvres 751 à 02 centimes 15.02
Total 829.03
Notes
1 -Certains villages du côté français de l’Estéron ont bénéficié de l’ouverture du pont, notamment Dosfraires, Le Broc, Bouyon accessible notamment par le pont de la Cerise, etc… mais n’ont pas participé à l’emprunt auxquels étaient soumis les villages côté sarde.
2 -Il était prévu que la retenue sur travaux de 10% soit levée à la livraison du pont. C’était l’équivalent de la retenue de garantie moderne qui est plus restrictive
3 – Dans les tarifs du péage il n’est pas mentionné de vaches ou boeufs
4 - Répartition des villages suivant le Traité de Turin :
5 – Divers noms ont été utilisés pour ce pont. Le village de la rive gauche s’appelait alors la Roquette Saint Martin. Le village de Saint Martin du Var est devenu indépendant en 1867. La Madeleine est un quartier de la rive droite près du pont. On trouve aussi le nom de pont de Bonson.
7 – L’emprunt du consortium s‘élevait à 80000 F à rembourser sur 10 ans à partir de 1852, soit environ 8000 F par an pour la capital seul ou 660 f par mois. Or d’après Jean Bernard Lacroix, le remboursement du premier mois de 1852 s’élevait à 310 F. D’après le journal du 9 octobre 1853 le remboursement pour un mois était de 280 F environ à ce moment. Il semble donc qu’on était loin du compte
8 – L’endiguement du Var a été une opération de longue haleine par tronçons successifs. A l’époque de la construction du pont, la digue existait déjà au niveau de Saint Martin du Var. Voir dossier Internet
9 – Avenir de Nice le lundi 10 avril 1855 « Le projet de route de l’Estéron ayant reçu l’approbation du congrès permanent des Ponts et Chaussées…on peut espérer que les travaux pourront être commencés dans les premiers jours du mois de Mai prochain »
Bibliographie
Ceccarelli Henri La basse vallée du Var travaux d’endiguement et de colmatage consultable sur Internet
Lacroix Jean Bernard –les ponts des Alpes Maritimes – Nice Historique N° 446 – année 2005
Journal l’Avenir de Nice – ADAM
Nice Historique 1936 page 116 – Les communications dans l’ancien Comté de Nice
Nice Historique 1954
Seguin Ainé – Des ponts en fil de fer – seconde édition 1826 – A Paris chez Bachelier libraire – quai des Augustins N° 55